INTERNATIONAL - "On va
s'en occuper". La réponse laconique de Donald
Trump au nouveau tir de missile intercontinental de Pyongyang, mardi 28 novembre, entraîne des interrogations. Alors que la
tension croît de nouveau entre les États-Unis et la Corée
du Nord, la perspective d'un conflit armé
imminent refait surface, tant le président américain et son homologue Kim
Jong-un apparaissent imprévisibles.
Lors du Conseil de sécurité
de l'ONU réuni ce mercredi 29 novembre en urgence pour discuter de ce dernier
tir de missile intercontinental,
les Etats-Unis ont appelé tous les pays à couper leurs relations diplomatiques
et commerciales avec la Corée du Nord, menaçant
de "détruire complètement" le régime nord-coréen "en cas de
guerre", selon l'ambassadrice américaine Nikki Haley. Avec son dernier tir
de missile, la Corée du Nord "a choisi l'agression" plutôt qu'un
processus pacifique. "Le comportement de la Corée du Nord est de plus en
plus intolérable", a lancé la diplomate,
Mardi, le leader nord-coréen
a affirmé que son pays était devenu un Etat nucléaire à part entière, après
avoir testé avec succès un nouveau type de missile susceptible de frapper
n'importe où aux Etats-Unis. Un nouveau défi pour Donald Trump, qui avait
assuré que le développement de telles capacités "n'arriverait pas",
tout en menaçant le régime nord-coréen: "la Corée du Nord ferait mieux de
ne plus proférer de menaces envers les États-Unis, sinon elle devra faire face
au feu et à la colère."
D'invectives en surnoms douteux, la question est de savoir si ces menaces pourraient entraîner
une guerre nucléaire, potentiellement dévastatrice pour l'ensemble de la
planète. Mais ls spécialistes du conflit sont pour leur part moins
catastrophés.
Encore loin d'un conflit armé
"Les deux pays n'ont
aucun intérêt à se faire la guerre", tranche le chercheur de la Fondation
pour la Recherche Stratégique, Antoine Bondaz, au HuffPost. D'un côté, Kim Jong-un sait
qu'un conflit armé l'opposant aux États-Unis entraînerait la disparition de son
régime. De l'autre, les Américains sont conscients qu'une intervention
militaire aurait "un coût humain et économique considérable",
explique ce spécialiste du régime de Kim Jong-un.
Selon lui, "il n'est pas
sûr que des bombardements réduisent la capacité militaire de la Corée du
Nord". En revanche, ces éventuelles frappes entraîneraient, sans aucun
doute possible, une réponse militaire de Pyongyang et pourraient donc causer
des dégâts considérables, notamment en Corée du Sud, allié proche des
États-Unis.
Autre conséquence dans la
région: de telles actions militaires mettraient les dirigeants chinois dans
l'embarras, encore plus qu'ils ne le sont aujourd'hui. Liée à la Corée du Nord
depuis 1961 par un traité d'amitié, de coopération et d'assistance mutuelle, la
Chine ne peut pourtant pas fermer les yeux sur la menace que représente Kim
Jong-un. Un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères a même
exprimé sa "vive inquiétude" et son "opposition" après le
nouveau tir de missile. Cependant, ils n'accepterait sans doute pas de voir la
Corée du Nord réduite en cendres, ce qui induirait une Corée réunifiée et donc
alliée des États-Unis.
"Le scénario militaire
est possible", estime Antoine Bondaz, mais il entraînerait un coût
économique et géopolitique que les États-Unis veulent éviter. C'est pourquoi le
secrétaire d'Etat américain Rex Tillerson ne cesse de répéter que les "options
diplomatiques" restent "sur la table."
Vers l'ouverture diplomatique?
Et si certaines capitales
frémissent à l'idée d'une Corée du Nord nucléaire, d'autres pourraient y voir
une possibilité d'ouverture diplomatique. Le but ultime de Kim Jong-un a toujours
été de représenter une menace crédible de frappe nucléaire contre les
Etats-Unis. Il assimile souvent son arsenal nucléaire à une "épée
chérie", capable de protéger le pays d'une invasion de "l'ennemi
impérialiste" américain.
Le Nord a toujours maintenu
que ses armements nucléaires étaient non négociables et qu'il ne s'adresserait
aux Etats-Unis que d'égal à égal. C'est la position qu'il dit avoir atteinte
désormais. Le communiqué officiel sur l'essai du missile contient une
"déclaration solennelle": le Nord se comportera toujours en
"puissance nucléaire responsable" et ne représentera aucun danger
pour les pays tiers tant qu'il n'est pas lui-même menacé.
Force est de constater que
les pressions considérables exercées sur Pyongyang ne l'ont pas fait bouger
d'un pouce et les appels au dialogue devraient donc se multiplier. "Chacun
sait que ces sanctions sont insuffisantes pour changer quoique ce soit. Il
serait plus efficace d'interdire l'envoi de travailleurs étrangers et de couper
le robinet du pétrole par exemple", explique le directeur de l'Institut
d'histoire sociale, Pierre Rigoulot, au HuffPost.
S'asseoir à la même table
qu'un pays qui est parvenu à son objectif en violant systématiquement de
multiples résolutions de l'ONU constituerait un recul pour la communauté
internationale, mais reste une des options les plus crédibles.
"Démilitariser la Corée du Nord n'est pas un objectif possible à court
terme (...) mais la communauté internationale peut mettre une pression maximum
sur Pyongyang pour pousser Kim Jong-un à négocier, et à terme obtenir un gel
des capacités militaires", détaille le spécialiste Antoine Bondaz.
Pierre Rigoulot se montre
cependant plus pessimiste quant aux résultats de ces pourparlers. "Les
négociations ne servent a rien. Cela fait des années que l'on discute en
vain", explique-t-il, avant de dénoncer l'attitude nord-coréenne:
"ils utilisent les négociations pour gagner du temps et peaufiner leur
travail balistique."
29/11/2017 18:33
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