L’empereur et l’impératrice du Japon reçoivent Donald et
Melania Trump au Palais impérial, à Tokyo, le 6 novembre. LAURENT FIEVET, ISSEI
KATO / AFP
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L’étape
japonaise, la première de la tournée asiatique de Donald
Trump en Asie, n’aura pas été la plus
difficile. Sous le soleil de Tokyo, le président des Etats-Unis et son hôte, le
premier ministre Shinzo Abe, ont pu faire
étalage de l’excellence de leurs relations. Elle est facilitée par l’unité de
vue sur le dossier dominant de la tournée asiatique de M. Trump : la Corée du Nord
et ses programmes nucléaire et balistique.
La question, à l’origine de vives tensions au cours de
l’été, a dominé leurs échanges, lundi 6 novembre, après une cérémonie en
présence du couple impérial. Elle a connu un moment émouvant au moment de la
rencontre des deux dirigeants avec des proches de la petite vingtaine de
Japonais enlevés par des agents de Pyongyang de 1977 à 1983 pour former
des espions, comme le régime l’a reconnu ultérieurement.
Après George W. Bush et Barack Obama, M. Trump a pu
s’entretenir avec Sakie Yokota, la mère d’une fillette kidnappée à 13 ans en
1977, Megumi. Il avait évoqué le sort de cette dernière en septembre, dans son
discours prononcé à l’Assemblée générale des Nations unies. Un choix dont M.
Trump s’est flatté, lundi, au cours d’une conférence de presse commune avec son
hôte, et qui a été revendiqué dimanche par la Maison Blanche pour mettre
en lumière, « la nature du régime
» nord-coréen et ses violations des «
droits de l’homme » par ailleurs rarement évoqués par
l’administration américaine.
La veille, jour de l’arrivée au Japon de M. Trump, le Rodong Sinmun, le journal du
Parti du travail de Corée du Nord,
avait prévenu le président américain, qualifié de « mentalement instable », qu’il devait s’abstenir de toute « remarque irresponsable ». Peu
après s’être posé sur la base militaire de Yokota, dans l’ouest de Tokyo, le
président des Etats-Unis a affiché sa détermination. « Personne, aucun dictateur, aucun régime, aucune nation, ne devrait sous-estimer,
jamais, la détermination américaine », a-t-il assuré devant des
dizaines de militaires américains après avoir
enfilé un blouson d’aviateur.
Trump « prêt à une rencontre »
avec Kim Jong-un
Tout en vantant son bilan à la Maison Blanche, il s’est en
revanche abstenu dimanche et lundi de reprendre
les formules agressives publiées sur son compte Twitter au cours des derniers mois,
ou prononcées devant les Nations unies. « Certains jugent ma rhétorique trop forte, s’est défendu
lundi M. Trump, mais regardez où
nous a conduits une rhétorique faible ». Dans un entretien diffusé
dimanche soir par une chaîne américaine, il n’a pas écarté l’idée de rencontrer
le dirigeant nord-coréen, Kim Jong-un, assurant être « prêt à faire ça », tout en jugeant que « c’est bien trop tôt ».
Shinzo Abe, qui s’est toujours abstenu de critiquer
les déclarations les plus virulentes du président des Etats-Unis, a réaffirmé
au cours de la conférence de presse de lundi qu’il partageait « à 100 % » les positions
américaines, y compris celle selon laquelle« toutes les options sont sur la table », donc l’éventuel
recours à la force. Il a promis de détruire
« si nécessaire » des
missiles tirés par la Corée du Nord. Le nord de l’archipel a été survolé à deux
reprises lors d’essais balistiques au cours des derniers mois.
La stratégie, a poursuivi le premier ministre, est
d’appliquer « le maximum de
pression sur le régime nord-coréen » pour l’amener à renoncer
à son programme nucléaire. M. Abe a annoncé lundi le gel des avoirs de 35 personnalités et organisations
nord-coréennes. M. Trump devrait revenir
à la charge auprès de son homologue chinois Xi Jinping lors de l’étape cruciale
de Pékin, partenaire économique incontournable de Pyongyang, où il arrivera
mercredi après un arrêt en Corée
du Sud. Côté américain, l’administration examine toujours, comme l’a confirmé
un haut responsable dimanche, l’éventuelle réinscription du régime de Pyongyang
sur la liste des pays soutenant le terrorisme. Washington l’avait retiré en
2008 pour favoriser
des négociations qui avaient fini par tourner
court.
L’empereur et l’impératrice du Japon reçoivent Donald et
Melania Trump au Palais impérial, à Tokyo, le 6 novembre. LAURENT FIEVET, ISSEI
KATO / AFP
Au Japon, Donald Trump a profité de sa visite pour réaffirmer
la solidité de l’alliance avec un pays décrit comme « un partenaire précieux et un allié crucial » des
Etats-Unis. M. Abe a souhaité, de son côté, « renforcer
plus encore les liens de l’alliance américano-japonaise, fondée sur des
relations de confiance et d’amitié avec le président Trump »,
jugeant lundi sa visite «
historique ». « Notre
relation est vraiment extraordinaire. Nous nous apprécions et nos pays
s’apprécient », a assuré dimanche soir le président avant un dîner
de wagyu (bœuf
japonais) et de homard chez Ukai-Tei, un restaurant huppé du quartier chic de
Ginza. « Je pense que nous
n’avons jamais été aussi proches du Japon que nous le sommes maintenant »,
n’a-t-il cessé de répéter
dimanche et lundi.
Partie de golf
A Tokyo, on aime rappeler
qu’en moins d’un an, avant la visite de dimanche et de lundi, les deux dirigeants
s’étaient déjà rencontrés cinq fois et parlé au téléphone à seize reprises, une
relation jugée bien plus fructueuse qu’avec le prédécesseur de M. Trump, Barack
Obama. On se donne du « Shinzo »
et du « Donald », et
Tokyo veut croire
que le président suit les conseils de M. Abe. Lors de leur rencontre de
septembre, en marge de l’Assemblée générale des Nations unies, le chef du
gouvernement nippon lui a conseillé de rencontrer le président philippin
Rodrigo Duterte, critiqué pour son mépris des droits de l’homme. « Si Shinzo le dit, rencontrons-le »,
aurait réagi Donald Trump.
Lire aussi : Le
délicat voyage de Donald Trump en Asie
Une amitié confortée par le golf, une passion commune.
Presque aussitôt après son arrivée sur le sol japonais, le président a
d’ailleurs filé rejoindre
Shinzo Abe au Kasumigaseki Country Club, dans le département de Saitama, au
nord de la capitale nippone. Ce parcours, créé en 1929, l’un des plus anciens
du Japon, accueillera les épreuves de golf
des Jeux olympiques de
2020. Les deux dirigeants ont passé l’après-midi à jouer
en compagnie de Hideki Matsuyama, actuel numéro un japonais et récent deuxième
de l’US Open. « Donald Trump est
un fan », se rengorge-t-on au ministère japonais des affaires étrangères. Dans
un Tweet, Shinzo Abe a parlé d’une «
partie de golf avec un merveilleux ami (le président Donald J. Trump), enrichie
d’une conversation animée ». Les deux hommes n’ont pas compté les
scores.
Cette diplomatie rappelle celle entre
Nobusuke Kishi, ce grand-père que Shinzo Abe adule et qui fut premier ministre
entre 1957 et 1960, et le président des Etats-Unis Dwight Eisenhower. A
l’époque déjà, les deux dirigeants avaient mis en scène en 1957 une partie de
golf sur un parcours du Minnesota.
Le Monde.fr avec AFP |
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