Les islamistes qui sèment la terreur dans la ville de Marawi se réclament de Daesh et ont déjà fait de nombreuses victimes. L'armée est en train d'intervenir.
L'armée
philippine bombarde depuis les airs jeudi une ville du sud de
l'archipel où des islamistes inspirés par l'organisation Etat islamique
ont tué au moins 11 civils, selon les médias, justifiant l'instauration
de la loi martiale par le président Rodrigo Duterte.
Les combattants islamistes ont commencé voici deux jours à semer le
chaos dans la localité à majorité musulmane de Marawi, ce qui a décidé
M. Duterte à décréter le régime d'exception dans toute la région de
Mindanao. Celle-ci s'étend sur un tiers méridional du territoire
philippin et 20% des plus de cent millions d'habitants de l'archipel y
vivent.
Les autorités expliquent qu'il est très difficile de venir à bout de
la crise même si les jihadistes ne sont plus que 30 ou 40. Ils sont
retranchés dans des immeubles résidentiels, ont placé des bombes
artisanales dans les rues et pris des catholiques en otages.
Des tirs nourris ont résonné avec régularité tout au long de la journée, a raconté un photographe de l'AFP sur les lieux.
L'armée a annoncé avoir largué des bombes sur des quartiers résidentiels.
"Nous procédons à des frappes chirurgicales", a dit Jo-Ar
Herrera, porte-parole local des militaires, peu avant que d'épais nuages
de fumée noire ne s'échappent d'un site bombardé.
Nombre des 200 000 habitants de cette ville située à environ 800
kilomètres au sud de Manille ont pris la fuite. Ceux qui restent ont été
priés de quitter les quartiers où se déroulent les combats, a ajouté le
porte-parole.
"Nous demandons aux habitants de se rendre en lieu sûr (...) et de rester à l'intérieur".
Selon l'armée, cinq soldats et deux policiers ont été tués dans les
affrontements, de même que 26 jihadistes, et 39 soldats ont été blessés.
Raid raté
D'après le lieutenant-colonel Herrera, deux civils ont été tués dans
un hôpital occupé mardi par les islamistes. L'armée enquête sur des
informations selon lesquelles neuf civils ont été assassinés à un poste
de contrôle jihadiste.
La télévision GMA a diffusé des images où l'on voit les corps de neuf
personnes, apparemment tuées par balle. Les victimes avaient les mains
liées.
M. Duterte avait annoncé mercredi qu'un chef de la police avait été pris à l'un de ces barrages et décapité.
Les islamistes retiennent aussi en otages entre 12 et 15 catholiques
capturés dans une cathédrale, dont un prêtre, selon l'évêque de la
ville, Edwin Dela Pena.
Les combats de Marawi ont éclaté après un raid des forces de sécurité
contre une cache supposée d'Isnilon Hapilon, considéré comme le chef de
l'EI aux Philippines.
Les Etats-Unis, qui présentent Isnilon Hapilon comme un des
terroristes les plus dangereux du monde, ont mis sa tête à prix pour
cinq millions de dollars. C'est également un des dirigeants d'Abou
Sayyaf, groupe islamiste spécialisé dans les enlèvements crapuleux.
Mais les forces de sécurité ont essuyé un échec retentissant. Des
dizaines de combattants sont accourus pour les repousser, avant de
partir saccager la ville en brandissant des drapeaux noirs de l'EI.
Ils ont également pris d'assaut deux prisons et une centaine de
détenus sont désormais en cavale, d'après Mujiv Hataman, gouverneur d'un
district musulman autonome qui comprend Marawi.
Montée en puissance de l'EI
Les islamistes ont incendié de nombreux bâtiments, y compris une église et une université.
Furieux, le président Duterte qui rencontrait à Moscou son homologue
Vladimir Poutine, a décrété la loi martiale nécessaire selon lui pour
lutter contre la menace terroriste, écourtant son voyage. "C'est de la brutalité, de la cruauté", a-t-il dit.
Il a menacé d'étendre la loi martiale à tout le pays, promettant la "sévérité".
Initiateur d'une guerre controversée contre la drogue qui a fait des
milliers de morts, M. Duterte a ajouté que la loi martiale évoquerait le
temps de la dictature de Ferdinand Marcos, renversé en 1986.
Depuis les années 1970, la rébellion musulmane réclame une région
autonome ou indépendante sur Mindanao et les combats ont fait plus de
130 000 morts.
Les principaux groupes de la rébellion musulmane négocient la paix avec le gouvernement.
Mais Abou Sayyaf, Maute et d'autres groupes islamistes veulent y établir un califat au nom de l'EI, d'après les experts.
Abou Sayyaf, présent sur la plupart des îles les plus méridionales de
Mindanao, a enlevé contre rançon des centaines de Philippins et
d'étrangers depuis les années 1990.
D'après les spécialistes des questions de sécurité, Isnilon Hapilon
s'efforce d'unifier les groupes philippins qui ont prêté allégeance à
l'EI.
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