En Thaïlande, cela fait maintenant quatre mois que le
nouveau roi Maha Vajiralongkorn a été intronisé. Avant qu’il ne monte sur le
trône, beaucoup prévoyaient qu’il ne s’intéresserait pas à la politique et
qu’il se contenterait de profiter pleinement des avantages de la fonction. Ses
premiers mois de règne semblent pourtant infirmer cette prédiction.
Depuis quatre mois, le caractère dominant du règne de Maha Vajiralongkorn a
surtout été l’interventionnisme du nouveau roi. Cela a été très clair lors de
la promulgation de la nouvelle Constitution. Contre toute attente, le roi a
refusé, au début de janvier, de promulguer le projet de Constitution qui avait
été approuvé par référendum. Il a demandé à la junte d’opérer plusieurs
changements. Les généraux ont été à la fois surpris et furieux, car ils y ont
vu un camouflet.
Les changements concernaient des articles importants. Le
roi demandait notamment que le Parlement ne contresigne plus les ordres royaux.
Il a souhaité aussi que ses pouvoirs d’intervention en cas de crise politique soient
rétablis – ils avaient été transférés à la Cour constitutionnelle dans le
projet de charte. Ces deux dispositions touchent au cœur même du système
politique thaïlandais et de la conception « semi-absolutiste » de la
monarchie constitutionnelle thaïlandaise.
Les
généraux veulent éviter un bras de fer avec le nouveau roi
Les généraux ont toutefois obtempéré. Ils n’avaient pas
vraiment le choix car ils ont multiplié les accusations de lèse-majesté depuis
qu’ils ont pris le pouvoir en 2014, et ils pouvaient dès lors difficilement
engager un bras de fer avec le nouveau roi.
Ces modifications constitutionnelles représentent une
perte de pouvoir pour la junte. Dans les dix dernières années du règne
précédent, celui du roi Bhumibol qui est décédé en octobre dernier, les
militaires ont utilisé la monarchie comme un instrument pour protéger leurs
intérêts. Durant tout le règne du roi Bhumibol, il y avait une sorte d’harmonie
entre le palais et l’armée. La relation était mutuellement bénéficiaire, mais
c’étaient les militaires qui donnaient le tempo.
Quarante
officiels du palais royal renvoyés
Maha Vajiralongkorn adopte une attitude différente. D’une
part, il est lui-même un militaire de carrière, donc, il connait les forces
armées de l’intérieur. D’autre part, il a fait comprendre aux chefs actuels des
forces armées qu’il ne comptait pas obtempérer docilement à tout ce qu’ils lui
demanderaient. Avec ces récents changements constitutionnels, il leur a fait
passer clairement le message.
Avant de devenir roi, Vajiralongkorn avait
la réputation d’être très autoritaire. Un trait de caractère qui s’est
rapidement confirmé depuis son accession au trône. Environ quarante officiels
du palais royal ont été renvoyés ces dernières semaines pour diverses raisons.
Dans un cas de figure, un des plus importants dignitaires du palais a été
accusé de « comportement
extrêmement maléfique ». Accusé d’empiètement sur une réserve
forestière nationale, il a eu le crâne rasé – une pratique courante pour
ceux qui ont perdu les faveurs de Vajiralongkorn – et il a été jeté en
prison. Il y a d'ailleurs actuellement une profonde atmosphère de peur dans les
cercles autour du palais royal.
Arnaud Dubus
notre correspondant à Bangkok
le 17-04-2017
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